L’éveil aux mathématiques chez les enfants de 4 et 5 ans

22/06/2016 11:18:15

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Plusieurs chercheurs rapportent que les premières années de vie ont une incidence sur la réussite éducative ultérieure de l’enfant (McCain et al., 2007; Scweinhart et al., 2005), en particulier sur les habiletés et les connaissances que celui-ci peut développer au préscolaire en ce qui a trait à l’éveil aux mathématiques, au langage et à la littératie. Ces habiletés au préscolaire permettraient à la tour de prédire la réussite éducative de l’enfant en troisième année du primaire (Duncan et al., 2007).

Un grand nombre de chercheurs soulignent plus particulièrement l’importance de l’éveil aux mathématiques dès la petite enfance pour favoriser le développement cognitif (Clements & Sarama, 2012; Starkey & Klein, 2000). La période préscolaire serait d’ailleurs critique pour le développement des mathématiques (McCain et al., 2007; Starkey & Klein, 2000) puisqu’elle coïncide avec le développement rapide du lobe frontal et que c’est à cette période que certaines fonctions mentales supérieures apparaissent, telles que la résolution de problèmes, la planification, la compréhension des quantités, l’utilisation des symboles et le raisonnement spatial (McCain et al., 2007; Starkey & Klein, 2000).

Or l’Enquête québécoise sur le développement des enfants à la maternelle 2012 (Simard, Tremblay, Lavoie, & Audet, 2013) a révélé que 10 % des enfants québécois de maternelle sont considérés comme vulnérables sur les plans du développement cognitif et langagier. On peut penser que certains de ces enfants n’ont pas reçu une stimulation suffisante pour les éveiller aux mathématiques avant leur entrée à l’école. En ce sens, une grande proportion d’enfants issus de milieux défavorisés ne bénéficieraient pas de contextes éducatifs de qualité afin de développer des habiletés de base en mathématiques (Arnold, Fisher, Doctoroff, & Dobbs, 2002; Jalbert & Pagani, 2007; Starkey & Klein, 2000). Ces enfants auraient davantage de difficultés avec les concepts des nombres, des séquences, de la géométrie et du raisonnement spatial (Case & Sowder, 1990), ce qui les empêcherait d’utiliser des stratégies efficaces en mathématiques (Fuson, 1992).

En contrepartie, l’étude de Fuson (1992) démontre que les enfants ayant vécu dans de nombreux contextes éducatifs de qualité dès leur jeune âge montrent un éveil aux mathématiques plus développé lors de leur entrée au préscolaire.

 

Comment favoriser l’éveil aux mathématiques chez les enfants de 4 et 5 ans

L’éveil aux mathématiques est important, mais comment l’encourager? Voici quelques activités issues des écrits de Clements et Sarama (2009). Ces chercheurs étudient depuis plusieurs années la progression développementale des enfants et ils ont conçu des activités qui favorisent l’éveil aux mathématiques :

  • Inviter les enfants à compter en grand groupe jusqu’à dix ou plus selon le niveau du groupe. On peut leur demander de compter d’une drôle de façon, par exemple en faisant des jumping jacks, en frappant dans leurs mains, en marchant vers l’arrière ou en inventant une musique. Il est important de renforcer et d’encourager les enfants à faire un mouvement par compte puisqu’il y a alors correspondance un pour un.
  • Compter en faisant de drôles de voix, par exemple en pinçant son nez, en imitant une grosse voix pour faire comme un loup ou une voix aigüe comme un petit poulet. On peut aussi demander aux enfants de compter comme une girafe, c’est-à-dire dans leur tête, puisque la girafe ne fait pas de sons; cette façon peut calmer un groupe un peu trop exubérant.
  • Compter en commençant par un autre nombre que 0 ou 1, lorsque la plupart des enfants du groupe semblent prêts. Par exemple, on peut compter jusqu’à 10 en commençant à 3 ou bien commencer à compter à 5 et voir jusqu’où les enfants du groupe peuvent compter.
  • Inviter les enfants à faire des suites en utilisant du matériel : des boutons, des Smarties, des crayons, différentes formes géométriques, etc. Les séquences peuvent être de l’ordre du ABABA_ ou du ABAB_BAB.
  • Montrer des formes géométriques et demander aux enfants d’en trouver des semblables et des différentes.
  • Utiliser différents contenants de forme cylindrique et expliquer que les bases du cylindre sont des cercles. On trace alors sur un grand carton la base des différents contenants. Les enfants doivent ensuite faire la correspondance entre les tracés et les contenants. La discussion peut se poursuivre en leur demandant ce qu’ils savent sur les cercles et les cylindres. On peut répéter l’activité avec différentes formes.
  • Jouer à « devine à quel nombre je pense ». On cache un nombre de 0 à 10 derrière son dos (on met les mains dans le dos et on représente le nombre avec les doigts ou on peut le faire aussi avec des cartes) et les enfants doivent deviner le nombre. On donne des indices pour les aider, en employant par exemple les termes « plus grand », « plus petit » et « entre ».

Ces différentes activités soutiennent la progression développementale de l’éveil aux mathématiques chez les jeunes enfants (Clements & Sarama, 2009). Un dernier point à mentionner est que l’éveil aux mathématiques doit se réaliser dans un contexte de jeu, de découverte et où l’enfant est actif.

 

Références

Arnold, D. H., Fisher, P. H., Doctoroff, G. L., & Dobb, J. (2002). Accelerating math development in Head Start classrooms. Journal of Educational Psychology,92, 762–770.

Case, R., & Sowder, J. (1990). The development of computational estimation: A neo-Piagetian analysis. Cognition and Instruction, 7(2), 79-104.

Clements, D. H., & Sarama, J. (2012). Mathematics learning, assessment, and curriculum. Dans R. C. Pianta, L. Justice, S. W. Barnett, & S. Sheridan (Éds), Handbook of early education (pp. 217-239). New York: Guilford.

Clements, D. H., & Sarama, J. (2009). Learning and teaching early math: The learning trajectories approach. New York: Routledge.

Duncan, G. J., Dowsett, C. J., Claessens, A., Magnuson, K., Huston, A. C., Klebanov, P., …, Japel, C. (2007). School readiness and later achievement. Developmental Psychology, 43(6), 1428-1446.

Fuson, K. C. (1992). Research on whole number addition and subtraction. Dans Grouws, D. (Éd.), Handbook of Research on Mathematics Teaching and Learning (pp. 243-275). New York: Macmillan & Co.

Jalbert, J., & Pagani, L. S. (2007). La composante parentale d’un programme d’éveil numérique destiné aux enfants moins nantis du niveau de la maternelle représente-t-elle une valeur ajoutée? Revue des Sciences de l’Éducation, 33(1), 147-177.

McCain, M.N., Mustard. J.F. et Sankers, S. (2007). Early years study 2 : putting science into action. Toronto, Ontario : Council for early child development.

Schweinhart, L. J., Montie, J., Xiang, Z., Barnett, W. S., Belfield, C. R., & Nores, M. (2005). Lifetime effects: The High/Scope Perry Preschool study through age 40. (Monographs of the High/Scope Educational Research Foundation, 14). Ypsilanti, MI: High/Scope Press.

Simard, M., Tremblay, M.-E., Lavoie, A., & Audet, N. (2013). Enquête québécoise sur le développement des enfants à la maternelle 2012. Québec, Québec : Institut de la statistique du Québec.

Starkey, P., & Klein, A. (2000). Fostering parental support for children’s mathematical development: An intervention with Head Start families. Early Education and Development, 11, 659–680.

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